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Livre :« De la communauté internationale. Rôle et influence dans la transition démocratique haïtienne » par Wiener Kerns Fleurimond

Diffusé par Guy CETOUTE, dimanche 6 juillet 2008

mardi 8 juillet 2008

Introduction générale -

La fréquentation des œuvres est une expérience de connaissance qui n’est pas détachée de l’ordre social et de l’ordre humain, car « lire, c’est dialoguer avec les auteurs » appartenant à un espace social donné. Nous en prenons nettement conscience en lisant des écrits de la texture de celle de Fleurimond, dans lesquels apparaissent une personnalité, des objectifs intellectuels, une éthique. On parle d’éthique là où se prévalent les points de vue de l’analyste qui font apparaître sa lucidité, sa perspicacité, son courage et son franc-parler. Parce qu’il fat beaucoup de loyauté pour pouvoir prendre ses distances afin de dire ce qui est en toute loyauté.

Toutes les intonations de la voix de l’essayiste résonnent dans ses textes, comme s’il les écrivait en parlant, cela n’est pas impossible, car il est à la fois homme de paroles (radios) et homme de plume (journaux) Pour ce qui est du texte, tout est fait pour y apporter un maximum d’éclairage. On constate un riche paratexte constitué de préface, d’introduction, de conclusion et de quatrième de couverture qui encadrent, expliquent, autant que faire se peu, alors que le corps du texte est lui-même d’une grande clarté. Tout ça pour aider à saisir les méandres inextricables d’un fait central, désigné comme étant : « Crise politique 2000-2006 » et « Processus électoral : 2004-2006 » Le premier terme concerne la période controversée de la présidence d’Aristide obligée à quitter le pouvoir en février 2004, et son remplacement par un gouvernement provisoire investi d’une mission précise. Et le second terme renvoie justement à l‘organisation des élections par le Gouvernement provisoire de Latortue. On a parlé à juste titre de crise de six ans dans laquelle rien n’était simple, dans les actes comme dans les intentions de toutes les parties en présence. C’était pour dénouer ces deux nœuds gordiens qu’était entrée en scène la Communauté Internationale, mais qui en fait venait, en quelque sorte, dénouer une crise à laquelle elle avait contribué à créer, de près ou de loin. Si bien qu’elle était à la fois juge et partie. Sur le terrain, il y avait à l’œuvre deux sortes d’acteurs : ceux de l’extérieur dans le rôle d’intervenant, et ceux de l’intérieur qui ont demandé d’intervenir. Il important maintenant de voir les faits dans le détail, comme l’a fait minutieusement le journaliste éditorialiste

Quelques faits à retenir pour mieux comprendre ce qui est enjeu Dans cette crise de six ans se résolvant en un imbroglio, personne ne jouait réellement jeu univoque. La Communauté Internationale était intervenue pour « le renversement d’un pouvoir que les élites politiques, économiques et culturelles ne voulaient pour rien au monde. » Par la même occasion, il faut savoir au sujet du soutien de la plupart des institutions internationales à l’ancienne opposition contre l’ex-président de la République, Monsieur Jean-Bertrand Aristide. Au fait, « ce sont les acteurs politiques de l’ex-opposition et du régime de l’ancien Président Jean-Bertrand Aristide, par des stratagèmes assez analogues, qui avaient sollicité leur présence. » La Communauté Internationale, pour sa part, n’avait pas les mains totalement propres, parce que : « certains de ces pays amis en avaient profité quand ils n’encourageaient en sous-main, voire publiquement, cette crise pour régler leurs comptes avec un Président ne sachant que faire d’un trop plein de pouvoir qui a fini par lui échapper totalement » Voilà ce qu’il faut savoir pour se rendre compte de la complication de la situation. Mais comme Fleurimond a choisi comme angle d’analyse le rôle de la Communauté Internationale, nous le suivrons pas à pas.

Communauté Internationale comme angle d’analyse

Il y a à l’œuvre un parti pris, celui d’axer les analyses sur les rôles joués par les intervenants extérieurs. Commençons par identifier ce que recouvrent les termes : Communauté Internationale. Pour ce qui est de la communauté internationale, elle était « plurielle » comprenant des intervenants de toute nature : les « amis d’Haïti » : U.S.A., France, Canada, constituant le camp des gros acteurs, ceux tirent vraiment les ficelles. Puis viennent les petits qu’étaient les acteurs régionaux et extracontinentaux, dont on a retenu six, que sont : l’ONU, OEA, CARICOM, l’Union européenne, l’Union africaine, l’OIF. Le travail du journaliste va consister alors à montrer le rôle joué individuellement par chaque instance pour aider à dénouer la crise, dont chacune constituera un axe de lecture. Notre travail d’analyse suivra le même schéma en six chapitres.

A suivre….

Texte 2

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Le premier acteur : L’ONU, le plus important de tous les autres

De par son importance, et surtout de par son statut, l’Organisation des Nations Unis a eu la part du lion quant aux responsabilités à endosser qui s’articulent en trois segments : a) « rétablir l’ordre », b) « mettre en place la transition » ; c) « organiser les élections générales afin de doter le pays de dirigeants légitimes » Trois points faciles à lire sur le papier, mais difficiles à mettre en œuvre sur le terrain, pour toutes sortes de raisons qui ne sauraient échapper aux connaisseurs et observateurs attentifs de la réalité politico-sociale haïtienne. Le journaliste avisé a insisté lourdement sur deux points, savoir que la mission onusienne était hérissée de complications, puis difficulté à sécuriser un pays gangréné par une violence urbaine protéiforme, parfois commanditée par les différents acteurs politiques du pays. Donc les entraves à la mission s’expliquaient en partie par les intérêts contradictoires des Etats dits « pays amis » qui tiraient sur les ficelles dans l’ombre, puis à cause de la nature même de la mission qui cantonnait l’instance mondiale dans un rôle multiforme dans lequel elle était à la fois juge et partie, que l’essayiste a détaillé en ces termes : « Mission difficile, en effet, quand il fallait surveiller et faire respecter les droits de la personne humaine en même temps qu’il fallait assumer le rôle de maintien de l’ordre » Par ailleurs, il a décrit cet obstacle majeur sur la voie de la mission onusienne en ces autres termes : « Devant cette position intenable mise sous la pression continuelle des puissances qui contrôlent cette institution mondiale »

Bonnes notes

Ces préambules montrent déjà à l’évidence que l’ONU est jugée, et sera jugée tout au long, uniquement à l’aune des faits et non en fonction d’idéologies tendant à confondre l’organisme mondial avec les officines capitalistes. Il en résulte jusque là une bonne image de l’ONU. Et l’on pourrait continuer en mentionnant, toujours à sa décharge, que l’organisme mondial : « [….] a tenté de garder une certaine neutralité depuis le début du conflit » Y était-elle parvenue ? Là est toute la question. Puis, on apprendra qu’elle a été tout simplement mis devant le fait accompli du renversement du Président élu d’Haïti, Jean Bertrand Aristide : « Comme l’OEA, l’ONU ne voulait pas la chute du régime de M. Aristide avant l’expiration de son mandat de 5 ans, le 7 février 2006 »

Mauvaises notes

Mais il n’y a pas que de bonnes notes pour l’ONU qui n’a pas été parfaite sur le terrain, loin s’en faut. Certainement qu’il y a eu des ratés. D’une part, on apprend que : « Les différents services ou organisations installés dans le pays n’ont jamais été vraiment à la hauteur de leur mission, ou du moins, la confusion était telle qu’on n’arrivait pas à savoir clairement qui fait quoi dans cet Etat dans l’Etat » Par ailleurs, à propos de la MINUSTAH on saura qu’il était question de : « [….] mission mal définie et sur un terrain pas toujours favorable, la MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti), a eu toutes les peines du monde à se faire comprendre » Toujours à sa charge, et sur le chapitre de la conduite de sa mission, l’ONU s’est réellement comportée comme un Etat dans un Etat en agissant de manière unilatérale, parce que : « [….] la plupart des décisions ont été arrêtées avant même que les autorités haïtiennes de transition soient informées. Comme la décision de fixer une fois pour toute et sans en référer à aucune autorité haïtienne, la date des scrutins du 7 février 2006 » A cette manière de faire, on doit ajouter une forme d’impuissance. C’est peut-être à ces regrettables flottements qu’il faut, en partie, attribuer l’incompréhension dont l’organisme mondial a été l’objet. En effet, il a été critiqué, accusé de tous les maux, ensemble de jugements à la fois justes et excessifs, que le journaliste a résumé ainsi : « L’impuissance de cette organisation accusée de force d’occupation et de colonisation par certains, de laxisme et de complicité avec les partisans de l’ancien régime par d’autres. »

Quid des résultats finaux de la mission confiée à l’ONU ?

Selon le journaliste éditorialiste, l’ONU semble s’en être bien tirée, compte tenu de la difficulté avérée de la tâche. A quatre reprises, il a mentionné la conduite à bon port d’une entreprise menée avec les moyens du bord. Le premier nous dit sans ambages que : « [….] l’on peut penser qu’elle (institution mondiale) s’en est bien sortie. » ;

Le deuxième affirme que l’ONU : « [….] a pu surmonter les malentendus sans jamais faire taire les critiques venant de tous les côtés » ;

Le troisième revient avec le verbe surmonter : « [….] ont pu surmonter la problématique haïtienne pour ramener à bon port la transition jusqu’aux élections générales ». Et en conclusion : « Bref, tout le processus électoral a été donc l’affaire de l’ONU qui, depuis mars 2004, ne comptait plus le nombre de ses experts, de conseillers techniques, civils et militaires, diplomates, etc., en Haïti »

AnnonceTexte 3

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Cas de l’OEA : Rôle dans le dénouement de la crise Haïtienne

Le deuxième acteur, par ordre d’importance, demeure l’Organisation des Etats Américains. Pour mieux comprendre, il faut établir le contexte dans lequel l’action s’est inscrite, qui est celui notamment de la nouvelle donne qui a prévalu aux Amériques correspondant au « temps où les Etats de la région revendiquaient leur indépendance politique, et les peuples, la démocratie et la liberté de pouvoir choisir librement leurs dirigeants » Ce qui contraste grandement avec la période la guerre froide caractérisée par l’ opposition des deux blocs, communistes contre capitalistes, au cours de laquelle, sous couleur de combattre les communistes, les USA faisaient des Amériques sa chasse gardée réduisant les Etats dans le rôle de courroies de transmission de sa doctrine. Aussi, pendant longtemps, les Etats actuellement membres de l’OEA vivaient, et acceptaient la tutelle américaine qui s’octroyaient le droit de faire et défaire les gouvernements. Cependant avec la fin du communisme, notamment en URSS, une nouvelle heure a sonné pour les nations longtemps assujetties, ce que nous avons désigné comme nouvelle donne. Donc la crise haïtienne arrivait à point nommé pour servir de terrain d’essai à ces Etats en leur offrant une occasion en or pour prouver au monde, et se prouver à eux-mêmes, qu’ils pouvaient se déterminer librement. Toute la lecture des actions entreprises par l’OEA a été faite par le journaliste politique, Wiener Kerns F., en fonction de ce désir de montrer qu’on n’était plus aux ordres des Américains. En clair, deux faits sont à considérer : le phénomène principal consistant à la participation de l’OEA à la résolution de la crise haïtienne, et un phénomène secondaire, ou épiphénomène résidant dans la preuve de sa liberté acquise à faire par l’organisation régionale

Phénomène secondaire ou épiphénomène

Nous préférons débuter par le second point de notre démonstration en traitant de la nouvelle situation de l’OEA pour laquelle il était une question d’honneur de faire la preuve de manière spectaculaire qu’elle s’était véritablement libérée de la tutelle américaine. L’essayiste insistera beaucoup sur la nouvelle philosophie adoptée de l’organisation des Etats américains par l’usage d’expressions qui traduisent l’idée d’ « opposition à ». Le champ lexical ainsi crée est assez riche si l’on tient compte, qu’il est question soit de : « se libérer de la mainmise du grand frère américain et de voler de ses propres ailes », ou de : « Tenter de tenir tête aux Américains » ; soit de : « A su résister et n’est jamais revenu sur la ligne de Washington » ou : « Asseoir son prestige et son autonomie par rapport à la puissance américaine dans la région » pour dire tout simplement qu’on n’est plus soumis à. De plus, selon la démonstration fleurimondienne, la preuve d’indépendance devrait se concrétiser, non seulement dans les intentions, mais aussi dans les actes ; aussi, plus on s’investissait dans la résolution de la crise haïtienne, plus on était sûr de prouver son indépendance. En effet, la participation de l’Organisation régionale était à la mesure de son ambition, comme l’a noté le journaliste : « Cette active participation voulait prouver aux peuples de l’Amérique latine qu’elle est une organisation responsable dotée de capacité d’intervenir dans toute la région »

Phénomène principal ayant trait à la participation de l’OEA à la crise haïtienne Sur ce chapitre, il s’agira pour nous de mentionner les actions réellement entreprises par l’Organisation régionale pour aider à dénouer la crise haïtienne qui concernera tout ce qui peut être mis à l’actif de l’OEA, qui peut se lire en termes de séquences.

Le premier pas a été d’abord la reconnaissance du Gouvernement de transition, celui de Latortue. Le deuxième nous apparaît-être la participation à rétablir la sécurité dans le pays par la contribution maximale en hommes dans la MINUSTAH. A ce sujet, Fleurimond a écrit : « [….] ce sont les Etats Américains qui ont contribué davantage en hommes et en matériel à la force militaire et de police internationale composant la MINUSTAH Le Brésil ayant le commandement militaire, le Chili détient le commandement civil. » Le troisième pas peut consister dans le « rôle de premier plan dans l’organisation des élections, en prenant en charge l’impression des bulletins et des cartes électorales », puis à un moment donné, quand il était absolument évident que le Gouvernement de transition entendait jouer le temps en reportant une quatrième fois la date des élections, de frapper vigoureusement du point sur la table pour réclamer une date. Et les élections ont eu lieu, qui ont vu le triomphe de René Préval dans les urnes dès le premier tour.

En conclusion

Pour les deux paris de l’Organisation des Etats Américains, quel bilan tiré ? Un bilan positif, si l’on en croit ce qu’a écrit Wiener Kerns. Sur la petite guéguerre sourde contre le grand frère américain, l’OEA, a agi assez librement en résistant aux directives de la Maison Blanche, notamment sur le sujet du renversement du Président Aristide. Il est possible d’affirmer qu’elle a redoré son blason, comme cela était souhaité, puisque, nous dit le texte : « La force de l’OEA s’est renforcée dans dossier haïtien et le processus électoral »

Ce que confirme largement cette dernière pensée conclusive : « On peut estimer que l’Organisation des Etats Américains fut l’organisation internationale, avec son homologue de la CARICOM, la plus engagée et la plus volontaire à ce qu’Haïti retrouve le fonctionnement normal de ses institutions. »

Textes diffusés par Guy CETOUTE, dimanche 6 juillet 2008 - Correspondants et Amis, Nous présentons les textes tels ont paru sur le forum : Haïti-Nation

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